mercredi 25 janvier 2012

Histoire du livre à Paris aux XVIIe-XVIIIe siècles

La dernière conférence de Madame Emmanuelle Chapron à l’École pratiques des Hautes Études a traité d’un cas bien particulier, celui des bibliothèques des collèges britanniques de Paris sous l’Ancien Régime (Collège des Écossais, Collège des Irlandais et Séminaire anglais). Après que la Réforme se soit imposée dans les trois royaumes, l’objectif de ces fondations est d’abord celui de permettre à des jeunes gens de venir se former au ministère ecclésiastique à l’université de Paris. Il s’agit donc de collèges «sans exercice», dans lesquels il n’y a ni communauté permanente, ni enseignement à demeure.
Par ailleurs, les établissements britanniques se sont déplacés dans la capitale aux XVIIe et XVIIIe siècles. Enfin, leurs bibliothèques sont importantes, plus de 10 000 volumes par ex. au Séminaire anglais, mais elles ne sont en principe pas destinées aux élèves. Ceux-ci, qui peuvent bénéficier de bourses, ont en revanche accès à la bibliothèque «classique», et surtout ils doivent se procurer eux-mêmes leurs propres livres.
Le Collège des Écossais est le plus ancien, puisqu’il date du XIVe siècle, mais il acquiert un rayonnement certain par le dépôt en 1603 de la bibliothèque de l’archevêque de Glasgow. Le Collège est réorganisé en 1639, tandis que les statuts de 1707 incluent un règlement de la bibliothèque, peut-être sur le modèle des Bénédictins en 1663 (cf A. Franklin, Les Anciennes bibliothèques de Paris, I, p. 418). La plus grande attention est donnée aux outils de contrôle des prêts, et les liens semblent ici plus étroits entre les étudiants et la bibliothèque.
Le Collège des Irlandais reçoit, en 1726, le legs de la bibliothèque de Michael Moore, soit quelque 1200 volumes. La bibliothèque est établie vers 1770 dans un nouveau local, aménagé par Bélanger au-dessus de la chapelle, local qu’elle occupe toujours aujourd’hui: ses utilisateurs sont les étudiants en théologie et les prêtres en résidence. Le fonds a cependant été confisqué à la Révolution, de sorte que les collections conservées viennent le plus souvent d’autres fonds.
La bibliothèque des Irlandais aujourd'hui
Enfin, au séminaire anglais, la bibliothèque reçoit de nombreux legs. La gestion de Holden est relativement bien connue, grâce au livre de comptes que nous conservons pour les années 1743 à 1756 –le supérieur sera d’ailleurs attaqué sur le caractère somptuaire de certaines de ses dépenses. La collection est évaluée en 1756 à quelque 4500 volumes, avec un profil classique de bibliothèque ecclésiastique et un fonds important de polémique entre catholiques et anglicans, et à propos du jansénisme. Ces volumes doivent notamment permettre aux insulaires d’intervenir dans les controverses.
Après la destruction des jésuites, il est prévu de réunir les étudiants boursiers inscrits à Paris dans l’ancien collège Louis-le-Grand, mais cette opération ne concerne pas les bibliothèques et, par ailleurs, les boursiers irlandais en sont exclus, parce qu’ils doivent nécessairement suivre un cursus de formation en langue irlandaise.
Enfin, les établissements britanniques abritaient un certain nombre de «collections d’usage», qui sont les bibliothèques personnelles des prêtres logés sur place: en général, elles sont relativement modernes (70 à 80% de titres du XVIIIe siècle), et surtout elles ne sont pas léguées au Collège, mais bien à des personnes privées (contrairement à ce qui semble se passer dans un certain nombre d’autres collèges parisiens à la même époque).
La prochaine conférence de Madame Emmanuelle Chapron se tiendra le lundi 30 janvier à 14h, à l’École pratique des Hautes Études. Elle portera sur «Ursulines et frères des écoles: des livres pour les écoles». 

NB. Téléchargement en PDF de l'étude de Christian Hottin sur la Géographie historique de l'université de Paris du XIIe au XVIIIe siècle.

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